Quatrième de couverture
Il n’y a pas d’effet sans cause, Candide devrait le savoir !
Tout acquis aux leçons de l’optimiste docteur Pangloss – selon qui tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles -, Candide mène une existence heureuse dans le château de Thunder-Ten-Tronckh. Mais un jour, pour avoir embrassé la belle Cunégonde, il est brutalement chassé de son paradis terrestre.
De la Westphalie jusqu’en Turquie, en passant par la Hollande, l’Angleterre, le Portugal et les Amériques, il découvre une réalité odieuse, où la barbarie des hommes n’a d’égale que l’horreur provoquée par les catastrophes naturelles.
Instaurant un dispositif satirique d’une méchanceté inouïe à l’encontre des métaphysiques stériles, Voltaire rédige le plus noir mais aussi le plus enjoué de ses contes philosophiques.
Un conte abominable
Ce petit conte philosophique qui paraît « tout mignon », est effectivement auréolé d’une candeur extrême, mais fait en réalité le récit de choses abominables. La naïveté, l’innocence du héros nommé Candide (ce n’est pas pour rien), vient contraster avec le récit d’horreurs qu’il vit et qu’il voit. Les personnages en arrivent même à faire le « concours » de celui qui a vécu le plus de malheurs…
Alors, les personnages sont battus, réduits en esclavages violés, fauchés ; en bref, ce sont des victimes. Oui mais, pourquoi ? Est-ce du sadisme ?
En fait, toute cette souffrance ne semble être parfois qu’un artifice. On pense, à plusieurs reprises, que des personnages se font tuer, mais souvent la tentative échoue, et on les revoit quelques pages plus tard. Tous vivent de grandes souffrances, mais ils semblent toujours s’en faire et ils s’en remettent tout le temps. Au pire, quand ils finissent par voir le mal partout (comme Martin, un compagnon de voyage de Candide), ils adoptent une attitude désabusée, dans laquelle ils semblent se complaire.
Bref, Candide est un véritablement déchaînement de violence.
« Candide ou l’optimisme ». Quel optimisme ?
L’optimisme, c’est une des choses que Candide semble plus remettre en cause. La critique semble d’autant plus virulente contre l’optimisme de Leibniz – un philosophe -, qui est d’ailleurs cité une fois (une seule) dans l’ouvrage. Pangloss, un savant idolâtré par Candide durant la première moitié du conte, incarne cet optimisme naïf que défend Leibniz.
Pangloss est même un fanatique de l’optimisme abusif, comme on pourrait l’être d’un dogme religieux : il n’arrive pas « simplement » à voir la vie du bon côté, car il la voit nécessairement comme un enchaînement logique qui fait du monde qui les entoure « le meilleur des mondes possibles ». Et ce, quoi qu’il arrive… Pangloss pendu pensera encore que ce qui lui arrive est forcément un bien, pour d’autres.
Ce que semble surtout critiquer le narrateur, c’est l’espèce de passivité dans laquelle plonge l’optimiste transi : si tout ce qui arrive est le fruit d’une Providence qui veut forcément le meilleur, alors rien ne sert de lutter.
En ouvrant le livre sur une page au hasard, je suis tombée sur cette définition donnée par Candide :
_ Qu’est-ce que l’optimisme ? disait Cacambo.
_ Hélas ! dit Candide, c’est la rage de soutenir que tout est bien quand on est mal. »
Un conte initiatique
Si, au début de l’histoire, Candide est un jeune naif qui ne peut penser autrement qu’à travers les idées de son maître spirituel Pangloss, au fil du texte, Candide apprend à se détacher des croyances des autres, afin de poser un regard critique et surtout personnel sur le monde qui l’entoure. Et c’est ce regard (celui de Candide, celui de l’étranger sur l’étranger plus généralement), qui permet aussi l’apprentissage de la vie.
_ Quoi ! Vous n’avez point de moines qui enseignent, qui disputent, qui gouvernent, qui cabalent, et qui font brûler les gens qui ne sont pas de leur avis ?
_ Il faudrait que nous fussions fous, dit le vieillard ; nous sommes tous ici du même avis, et nous n’entendons pas ce que vous voulez dire avec vos moines.
En se rendant compte que l’autre est différent et peut légitimement penser différent de nous, on ouvre notre esprit et acceptons de nous remettre en question, surtout si le regard de l’autre découvre une vérité gênante. D’ailleurs, les personnages bornés dans leurs croyances, que ce soit dans l’optimisme (Pangloss), ou dans le pessimisme (Martin), restent campés sur leurs positions et n’évoluent pas.
Un appel à la simplicité
Il faut cultiver notre jardin.
Voilà le message ultime délivré par Candide. Les personnages vivent des aventures autant extraordinaires qu’affreuses, dans le but de trouver… le bonheur. Rien de fou, rien de plus banal. Or, cet état, simple et naturel, ne peut qu’être atteint avec… simplicité.
Cultivons notre jardin, notre propre jardin (occupons-nous de nos oignons) ; cultivons également notre jardin intérieur, notre paix intérieure qui est le secret du bonheur. Assez de débats inutiles et qui n’amènent à rien, le bonheur n’est ni dans l’optimisme, ni dans le pessimisme, car il est tout à la fois.
Pour terminer, voici une brève apologie du travail :
Le travail éloigne de nous trois grands maux, l’ennui, le vice, et le besoin.